Vers une « ré-internalisation » de la formation en France ?

7050 étudiants en odontologie en 2021-2025. Soit une augmentation de 14 % par rapport aux 6 300 étudiants initialement prévus pour cette période de cinq ans. Un effort sans précédent. C’est ce qu’a proposé, fin mars dernier, la conférence nationale « chargée de prévoir le nombre de professionnels de santé à former dans le cadre de la réforme de l’accès aux études médicales ». Un chiffre ambitieux qui a été avancé à l’issue de plusieurs mois de travaux auxquels le Conseil national a activement participé, notamment en produisant les données issues de son Observatoire.
Conduite par le Pr Emmanuel Touzé, président de l’Observatoire national de la démographie des professionnels de santé (ONDPS), cette conférence a pris en compte les enjeux qui traverse notre profession, notamment – mais pas seulement ! – la question des primo-inscrits diplômés hors de France (dont une majorité de Français). Pour établir cette évaluation de 7 050 praticiens à former entre 2021 et 2025, le rapport a croisé les évolutions de nos modes d’exercice, la dynamique des flux migratoires, l’évolution des besoins de santé des Français ainsi, bien sûr, que les capacités de formation des UFR d’odontologie.
À l’issue de ce travail, la conférence nationale n’a donc pas retenu les objectifs initiaux des ARS et des UFR, qui prônaient une augmentation de seulement 3 % et établissaient une cible de 6 460 étudiants en odontologie pour la période 2021-2025. La conférence nationale note qu’avec cet objectif initial, la « densité moyenne européenne (74/100 000 habitants en 2018) ne serait atteinte qu’aux environ de 2040 [et ne] suffirait pas à améliorer l’accès aux soins dans les territoires très déficitaires ». De plus, il existe des « besoins non satisfaits […] aujourd’hui très importants. Les populations à besoins spécifiques (petite enfance, situation de handicap, personnes dépendantes en institution ou non…) représentent 10 à 15 % de la population française et ont un accès aux soins très insuffisant actuellement ».
La conférence nationale pointe aussi les évolutions des comportements, notamment avec des jeunes praticiens qui souhaitent « un exercice plus équilibré entre vie professionnelle et vie personnelle ». Mais surtout elle intègre – et c’est véritablement sans précédent dans des travaux de ce type – la question des 35 % de chirurgiens-dentistes à diplôme étranger qui s’installent chaque année en France. Elle estime ainsi « crucial de réinternaliser la formation en odontologie afin d’en contrôler la qualité ».
Concrètement, la conférence propose de « répartir ces objectifs de professionnels à former dans les territoires ayant une faible densité ». Autrement dit, l’augmentation des effectifs étudiants serait ciblée pour contrecarrer le phénomène d’inégalité de la densité professionnelle dans le maillage territorial. Reste maintenant à attendre la réponse des politiques…